Les raisons derrière le désenchantement envers la profession d’expert-comptable

La profession d’expert-comptable, jadis perçue comme un pilier incontestable de la gestion financière et du conseil des entreprises, fait face aujourd’hui à un désintérêt croissant, principalement parmi les nouvelles générations. Ce désenchantement ne s’explique pas uniquement par les transformations technologiques qui automatisent les tâches répétitives, ni par une simple question d’image vieillissante. Il s’agit d’un phénomène complexe touchant à la fois l’évolution du métier, ses attentes, mais aussi la perception qu’en ont les étudiants et les jeunes professionnels. Tandis que certains grands cabinets comme KPMG, Deloitte ou PwC continuent de façonner des talents à forte expertise, la pénurie de collaborateurs compétents et motivés s’accentue, posant un défi majeur à toute la profession. Entre adaptations nécessaires et enjeu d’attractivité, comprendre les raisons profondes de ce phénomène s’avère essentiel pour redonner à cette discipline toute la reconnaissance et la dynamique qu’elle mérite.

Les transformations du métier d’expert-comptable : un défi d’adaptation face à la digitalisation

La digitalisation massive a bouleversé le quotidien des experts-comptables. Hier cantonné à des tâches comptables classiques, le métier s’oriente désormais vers des fonctions plus stratégiques et analytiques. L’automatisation des opérations à faible valeur ajoutée, grâce à l’intelligence artificielle et aux logiciels performants, modifie profondément les missions. Cette révolution technologique, qui concerne aussi bien les grands cabinets comme Mazars, Grant Thornton ou Baker Tilly que les structures plus modestes, requiert une montée en compétences rapide, notamment en finance, contrôle de gestion, fiscalité et droit.

Cette évolution ouvre des perspectives passionnantes mais engendre aussi des difficultés d’adaptation. En effet, les professionnels doivent désormais conjuguer technicité comptable et sens aigu du conseil stratégique, ce qui demande une polyvalence inhabituelle. Par ailleurs, la digitalisation a engendré une certaine pression autour des délais et de la qualité des informations fournies. Le contexte est loin d’être simple : alors que les clients attendent plus d’analyse et une meilleure capacité à anticiper leurs enjeux économiques, le savoir-faire technique ne suffit plus.

Le tableau ci-dessous résume les principaux domaines d’évolution des missions d’un expert-comptable depuis la généralisation des outils digitaux :

Domaines Missions classiques Missions actuelles
Traitement comptable Saisie, clôture, établissement des comptes annuels Automatisation via logiciels et intelligence artificielle
Contrôle fiscal et social Contrôle ponctuel et conformité Conseil proactif pour la conformité et optimisation fiscale
Conseil en gestion Peu développé, essentiellement réactif Analyse stratégique, pilotage financier et amélioration de la rentabilité
Accompagnement digital Quasi inexistant Implémentation d’outils numériques et cybersécurité

Cette transition est exigeante : elle nécessite des formations complémentaires et un engagement important dans l’apprentissage continu. Le défi est d’autant plus grand pour les experts-comptables exerçant dans des PME, où les budgets consacrés à la formation et à la modernisation des outils sont limités, contrairement aux cabinets internationaux tels que RSM, BDO ou RSM France.

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Cette dynamique impose un repositionnement complet de l’expert-comptable, désormais invité à conseiller non seulement sur les chiffres, mais aussi sur la stratégie IT et la gestion globale des risques, notamment les risques cyber, une problématique qui prend de plus en plus d’ampleur avec la multiplication des cyberattaques.

  • Passage d’une logique de saisie manuelle à l’automatisation des données financières.
  • Développement de compétences en analyse de données et business intelligence.
  • Intégration des enjeux numériques dans la gouvernance et la stratégie d’entreprise.
  • Rôle accru dans la prévention des risques liés à la cybersécurité.
  • Nécessité d’une veille réglementaire et technologique permanente.

Une image dégradée et obsolète freinant l’attractivité de la profession

Malgré ses évolutions profondes, l’image de l’expert-comptable stagne souvent dans une représentation datée et peu valorisante. Cette profession est fréquemment perçue par le grand public, ainsi que par les jeunes en orientation, comme un métier peu dynamique, centré uniquement sur la gestion administrative et la saisie de chiffres. Ces clichés, bien loin de la réalité, desservent lourdement le secteur et participent à sa crise de vocations. C’est un constat partagé dans les cabinets comme Sodexho, mais aussi chez les grands noms internationaux tels que PwC ou Deloitte.

De nombreux facteurs expliquent ce décalage d’image :

  • Manque de communication proactive sur les nouvelles missions stratégiques liées à la fonction.
  • Médiatisation insuffisante de la richesse du métier : gestion des risques, accompagnement entrepreneurial, conseil fiscal et informatique.
  • Perception d’un travail répétitif et peu créatif, marqué par des stéréotypes de “gratte-papier”.
  • Absence d’exposition dans les médias grand public favorisant l’intérêt pour d’autres filières plus “glamour”.
  • Concurrence avec d’autres professions dans le domaine financier, telles que les experts financiers ou les consultants spécialisés en gestion.

La conséquence majeure de cette image négative est un fort désintérêt des jeunes, notamment en écoles de commerce ou de comptabilité. Le métier semble peu attractif face aux promesses de carrières dans des établissements bancaires, sociétés de conseil en gestion de patrimoine ou dans la finance plus “tech”, animée par des groupes tels que KPMG et Grant Thornton. D’autant que la longue durée des études nécessaires pour devenir expert-comptable (diplôme d’expertise comptable – DEC, équivalent bac+8) est parfois perçue comme un frein supplémentaire.

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Pour illustrer, voici un tableau synthétique des perceptions communes associées au métier et la réalité observée dans les cabinets modernes :

Perceptions Réalisme actuel
Métier routinier et monotone Activités diversifiées intégrant conseil stratégique, digitalisation et accompagnement client
Travail isolé et solitaire Collaboration étroite avec les équipes clients, télétravail et échanges fréquents
Fonction purement technique Polyvalence avec rôle important en gestion financière, juridique et IT
Carrière limitée aux cabinets Multiples opportunités dans les entreprises, PME, groupes internationaux

Des acteurs majeurs comme BDO et RSM France multiplient les campagnes de communication pour casser ces préjugés, soulignant la valeur ajoutée des experts-comptables comme “conseillers qui comptent” dans la transformation numérique des entreprises et la sécurisation de leur environnement opérationnel. Ces actions restent néanmoins insuffisantes pour changer en profondeur une perception encore figée auprès des futurs professionnels.

L’évolution des attentes des entreprises clients et leurs impacts sur la profession

Avec la mutation accélérée des modèles économiques, les entreprises, notamment les PME et TPE, attendent aujourd’hui beaucoup plus de leurs experts-comptables. La fonction dépasse largement la tenue de comptes pour investir le champ du conseil opérationnel, de la digitalisation et de la gestion des risques. Cette tendance, largement constatée dans les cabinets tels que Mazars ou Baker Tilly, fait pression sur la nature même des compétences recherchées.

Concrètement, les clients exigent :

  • Une expertise pointue en pilotage économique : analyser la rentabilité, améliorer les processus et anticiper les évolutions.
  • Un accompagnement technologique pour intégrer la facture électronique obligatoire et déployer les outils numériques adaptés.
  • Une capacité à sécuriser les données et prévenir les cyber-menaces de plus en plus fréquentes.
  • Un rôle d’interface entre les différentes parties prenantes : banques, administrations, partenaires juridiques.
  • Une approche plus humaine, favorisant le dialogue et l’adaptation aux réalités métiers des entrepreneurs.

Cette redéfinition des prestations implique un élargissement de la palette de profils recrutés par les grands cabinets internationaux et leurs homologues nationaux. Les contraintes sont fortes, et la concurrence acharnée. Un tableau comparatif des profils types recherchés montre les différences entre métiers traditionnels et métiers-modèles du futur :

Profil Expertise traditionnelle Expertise requise en 2025
Compétences techniques Comptabilité, fiscalité Comptabilité, fiscalité, contrôle de gestion, analyse stratégique
Compétences digitales Usage limité des logiciels Maîtrise des outils numériques avancés et cybersécurité
Soft skills Communication basique Communication avancée, relations clients, esprit de conseil
Mobilité Travail majoritairement au cabinet Déplacements clients, télétravail, travail hybride
Formation continue Rarement formé post-diplôme Formation régulière et mise à jour permanente des connaissances

Cette évolution redessine les contours de la profession et crée une certaine tension, notamment sur le marché du travail, où la demande excède souvent l’offre, autant pour les grandes structures comme PwC et KPMG que pour des cabinets privés indépendants. Malgré cela, la fidélisation est parfois difficile, les jeunes talents préférant s’orienter vers des carrières plus valorisées socialement ou plus innovantes technologiquement.

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La pénurie de talents et les difficultés de recrutement dans la profession

Le désamour pour le métier d’expert-comptable se traduit par une pénurie tangible de collaborateurs qualifiés sur le marché. Cette situation est spécialement critique dans les cabinets de taille intermédiaire et dans les PME industrielles ou de services. RSM, Grant Thornton ou encore BDO ont souvent exprimé leur difficulté à recruter des profils adaptés à la multiplicité des tâches actuelles.

Plusieurs raisons expliquent ce phénomène :

  • Un déficit d’attractivité lié à une méconnaissance du métier réel : les jeunes diplômés perçoivent la profession comme routinière et peu valorisante.
  • La complexité accrue du métier exige des compétences multiples que peu de candidats maîtrisent entièrement.
  • La concurrence d’autres secteurs, notamment dans la finance et la tech, qui offrent des salaires attractifs et une image plus moderne.
  • Les conditions de travail souvent perçues comme rigides malgré les possibilités de télétravail et de flexibilité accrues depuis la pandémie.
  • Le délai d’accès à la pleine qualification, nécessitant un long parcours d’études et de stages.

Le tableau ci-dessous détaille les raisons principales du départ des jeunes experts-comptables et collaborateurs comptables :

Motifs de départ Proportion observée (%)
Manque d’évolution de carrière 34
Manque de reconnaissance 27
Conditions de travail difficiles 21
Meilleures opportunités ailleurs 18

À cela s’ajoute une compétition acharnée dans les cabinets leaders tels que Mazars ou Deloitte, qui doivent rivaliser pour attirer les talents non seulement dans leurs réseaux français, mais aussi à l’international. Il devient donc fondamental pour la profession de repenser ses modes de recrutement et les perspectives offertes aux jeunes afin d’éviter une dégradation plus profonde du système global.

Vers une redéfinition nécessaire pour restaurer l’attractivité et le sens du métier

Face aux tensions grandissantes, différents acteurs du secteur font émerger des solutions innovantes destinées à redonner un second souffle à la profession. Le salon Studyrama des formations Banque, Finance, Assurance et Comptabilité organisé chaque année à Paris joue un rôle capital en mettant en relation jeunes talents, professionnels et grandes structures comme BDO, Baker Tilly et Sodexho. Ces plateformes favorisent le partage d’expériences, la découverte des nouvelles tendances et la réhabilitation de la fonction d’expert-comptable.

Quelques pistes de réflexion et d’action se dégagent :

  • Renforcer la communication autour des valeurs et des mutations du métier afin de casser les idées reçues et susciter l’enthousiasme.
  • Adapter les formations pour mieux préparer les futurs experts-comptables aux exigences multiples du contexte actuel, en intégrant davantage la digitalisation, le conseil et la gestion des risques.
  • Diversifier les parcours en valorisant les expériences en entreprise, la mobilité internationale et l’interdisciplinarité.
  • Promouvoir un environnement de travail flexible conciliant télétravail, vie personnelle et développement professionnel.
  • Valoriser les compétences en communication, car l’expert-comptable devient aussi un acteur-clé du dialogue entre entreprises et partenaires.

Voici un tableau récapitulatif des leviers à mettre en œuvre pour restaurer l’attractivité du métier :

Levier Actions concrètes Objectifs visés
Communication Campagnes médias, témoignages, événements professionnels Changer l’image et attirer les jeunes talents
Formation Modules numériques, soft skills, connaissance juridique et fiscale approfondie Acquérir polyvalence et expertise complète
Accompagnement Mécénat, mentorat, coaching de carrière Améliorer la fidélisation et l’engagement
Conditions de travail Horaires flexibles, télétravail, équilibre vie pro/perso Réduction du turn-over et meilleure qualité de vie
Visibilité Participation à des salons comme Studyrama, webinaires, réseaux sociaux Valoriser la fonction auprès des futurs professionnels

Ces démarches sont soutenues par les grandes firmes du secteur telles que PwC, Deloitte et KPMG, qui innovent également sur leurs processus de recrutement. Néanmoins, la transformation durable de la profession passe aussi par un travail collectif pour redéfinir les repères et réhabiliter la noblesse d’un métier qui demeure un acteur clé dans le tissu économique national et international.